LA TERRIBLE CONCURRENCE
1980 : Le temps de l'imagerie et des
vieilles recettes
L'apparition du magnétoscope, le développement
des complexes multi-salles et des salles d'art et essai sont
autant de symptômes de la mutation du cinéma français.
La vitesse de rotation des films programmés s'accroît,
pénalisant les premiers longs métrages et les
oeuvres sans relais promotionnels. Pour la première fois,
l'audience des films américains dépasse celle
des films français. La télévision devient
de fait le premier producteur de films : en 1988, 53% des films
sont co-produits par des chaînes françaises. La
création de Canal +, de M6, de la 5 en 1985, puis de
la Sept en 1989 (devenue Arte en 1993), confirmera le déplacement
des spectateurs vers le petit écran et renforcera le
pouvoir des responsables de la télévision sur
les choix esthétiques du cinéma.
Arrivée au pouvoir, la gauche décide de prendre
une série de mesures d'aide au cinéma pour favoriser
la création, la diffusion, la conservation des films
et prévoit une restructuration de la Cinémathèque
française. Mais une politique assez paradoxale d'aide
aux films à gros budgets va accroître la tendance
à l'uniformisation. Une nouvelle esthétique apparaît,
influencée par la publicité. Jean-Jacques Beineix
fait un triomphe avec "37°2", Luc Besson avec
"Le Grand bleu" et "Subway". Sur le plan
de la comédie, les influences du café-théâtre
(le Splendid), du clip ("Delicatessen"), et de la
publicité (Etienne Chatiliez) remplacent le burlesque
des années 60 façon Jacques Tati ou Pierre Etaix,
le vaudeville ou la comédie à la française.
La production renoue avec des films à grand spectacle
comme "Jean de Florette", de Claude Berri, 1986 ou
"Le Nom de la rose", de Jean-Jacques Annaud, 1987.
D'autres formes de cinéma, plus marginales,
survivent en petits clans ou en utopies solitaires. Avec elles
souffle encore l'esprit de la Nouvelle Vague dans des styles
souvent différents (Paul Vecchiali, Benoît Jacquot,
Olivier Assayas, Philippe Garel...). Quant aux pionniers du
renouveau des années 60 (Jacques Rivette, Eric Rohmer,
Claude Chabrol), de la modernité (Alain Resnais) et du
réalisme (Maurice Pialat), ils occupent désormais
une place centrale, à côté des auteurs de
facture plus traditionnelle (Pierre Granier-Deferre, Claude
Berri, Bertrand Tavernier, Claude Sautet).